lundi 18 avril 2016

Crédit immobilier et dettes payables par termes successifs



Revue de Presse

En matière de prescription des dettes, la Cour de Cassation a rendu quatre arrêts importants.
Je vous invite à partager la lecture d'un article paru dans le numéro 49 de la revue "Votre Avocat vous informe", publié par les Editions Dalloz et le CNB.

Bonne lecture!

"Prescription des dettes payables par termes successifs : revirement de jurisprudence

À l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance.

Dans quatre arrêts du 11 février 2016, la Cour de cassation consacre, en matière de crédit immobilier, le principe de division de la prescription pour une dette payable par termes successifs.
Si l’application du délai biennal de prescription à l’action en remboursement d’un crédit immobilier a fait polémique, la fixation du point de départ du délai n’a pas non plus fait l’unanimité.

Sur le premier point, la Cour de cassation maintient sa position. Le délai applicable est bien celui de l’article L. 137-2 du code de la consommation en ce qu’il édicte une règle de portée générale ayant vocation à s’appliquer à tous les services financiers consentis par des professionnels à des particuliers, peu important, souligne la Cour dans le premier arrêt (n° 14-22.938), la nature du prêt, immobilier ou de trésorerie (rappelons toutefois qu’à l’encontre d’un non-consommateur, ce délai ne s’applique pas).

Sur le second point, en revanche, la Cour opère un revirement de jurisprudence sur le fondement de l’article L. 137-2 du code de la consommation, ensemble les articles 2224 et 2233 du code civil.

Par un arrêt du 10 juillet 2014, confirmé par la suite, la Cour de cassation avait uniformisé le point de départ du délai pour agir dans le cadre des prêts consentis par un professionnel à un consommateur, qu’il s’agisse d’un crédit mobilier ou immobilier. Le point de départ devait se situer à la date du premier incident de paiement non régularisé. Cet alignement des règles avait été vivement critiqué par une partie de la doctrine.

D’abord, la solution aboutirait à confondre délai de forclusion et délai de prescription.

Alors que le premier – et notamment l’article L. 311-52 du code de la consommation – est une injonction adressée au créancier de faire diligence, le second – spécialement l’article L. 137-2 du code de la consommation – tranche un conflit et a pour but de consolider la situation de fait du débiteur en posant, en quelque sorte, une présomption irréfragable de paiement.

Dès lors, si, en matière de crédit à la consommation, le délai de forclusion pourrait commencer à courir avant que la créance ne soit devenue intégralement exigible, en matière de crédit immobilier, la créance ne devrait se prescrire qu’à compter de son exigibilité, sans aucune référence possible à la notion d’incident de paiement.

Ensuite, cette solution serait confortée par l’article 2233, 3°, du code civil – applicable à la prescription biennale de l’article L.137-2 – aux termes duquel « la prescription ne court pas à l’égard d’une créance à terme, jusqu’à ce que le terme soit arrivé ». 

Dès lors, à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance.

Enfin, d’aucuns ont relevé que la solution retenue par la Cour de cassation obligeait le créancier à agir en déchéance très rapidement pour se préserver de tout risque de prescription.

Cela étant, certains auteurs avaient approuvé la décision de juillet 2014, notamment en ce qu’elle évitait une accumulation de dettes et qu’elle ne faisait pas dépendre le point de départ de la prescription de la seule volonté du prêteur, ce qui aurait été le cas si la déchéance du terme avait pu faire courir la prescription.

Amenée, une fois encore, à trancher la question, la Cour de cassation fait volte-face : « à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ».

Chaque échéance doit donc être prise distinctement.

La prescription court à compter de chacun des termes successifs exigibles, faits connus du titulaire de l’action conformément à l’article 2224 du code civil. En somme, il y aura autant de prescriptions que d’échéances.

Mais s’agissant du capital restant dû, il ne sera exigible qu’à compter de la déchéance du terme.

À titre d’illustration, prenons le seul arrêt de rejet (n° 14-22.938) sur les quatre décisions commentées.

L’assignation en justice des emprunteurs, délivrée le 7 février 2012, avait interrompu le délai de prescription contrairement aux cinq lettres recommandées précédemment envoyées.

En conséquence, si la banque était irrecevable à agir en paiement des échéances impayées devenues exigibles antérieurement au 7 février 2010, elle pouvait parfaitement réclamer l’échéance impayée du 7 février 2010, ainsi que le capital restant dû au 24 février 2010, date à laquelle elle avait prononcé la déchéance du terme."

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 11 février 2016, 14-22.938

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 11 février 2016, 14-28.383

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 11 février 2016, 14-27.143

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 11 février 2016, 14-29.539


Benoît VETTES - Avocat en droit immobilier et en droit de la construction

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mercredi 6 avril 2016

Contrat de construction de maison individuelle et non-respect des dispositions d'ordre public : quelles conséquences?


Revue de Presse

Contrat de construction de maison individuelle (CCMI), disposition d'ordre public et nullité  : la Cour de Cassation a rendu le 21 janvier 2016 un arrêt particulièrement intéressant concernant ces problématiques.

Ce qu'il faut savoir : à l'occasion de la construction de maisons individuelles, de nombreuses mauvaises surprises sont susceptibles de surgir.

Je vous invite à partager la lecture d'un article paru dans le numéro 49 de la revue "Votre Avocat vous informe", publié par les Editions Dalloz et le CNB.

 CCMI : la nullité n’implique pas nécessairement la démolition

Le maître de l’ouvrage qui invoque la nullité d’un contrat de construction de maison individuelle n’est pas tenu de demander la démolition de la construction, que le juge n’est pas tenu d’ordonner, et peut limiter sa demande à l’indemnisation du préjudice résultant de cette nullité.

Dans cette affaire, des époux ayant souscrit un contrat de construction de maison individuelle (CCMI) ont saisi le juge des référés en raison de malfaçons.

Par la suite, ils ont demandé la nullité du contrat pour le non-respect des dispositions d’ordre public du code de la construction et de l’habitation, tout en désirant conserver la construction.

Les juges d’appel ont déclaré leur demande irrecevable, au motif que les maîtres de l’ouvrage ne pouvaient pas solliciter l’annulation du contrat tout en s’abstenant d’invoquer la démolition de l’immeuble.

Cette décision est censurée par les magistrats du quai de l’Horloge.

Selon eux, « le maître de l’ouvrage, qui invoque la nullité d’un contrat de construction de maison individuelle, n’est pas tenu de demander la démolition de la construction, que le juge n’est pas tenu d’ordonner, et peut limiter sa demande à l’indemnisation du préjudice résultant de cette nullité ».

On rappellera que le code de la construction et de l’habitation (art. L. 230-1 s.) règlemente le régime spécial d’ordre public relatif au contrat de construction de maison individuelle.

Il permet ainsi la protection du maître de l’ouvrage, qui peut invoquer la nullité du contrat en cas de non-respect des dispositions d’ordre public.

Et dans ce cadre, le maître de l’ouvrage n’a donc pas l’obligation de solliciter la démolition, c’est-à-dire la remise en l’état initial stricto sensu.

Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 21 janvier 2016, 14-26.085

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mercredi 9 mars 2016

Indivision et signature d'un bail commercial : quelles sont les formes du mandat du professionnel de l'immobilier?



Revue de Presse

En matière de mandats et d'indivision les règles sont strictes.
Le professionnel de l'immobilier  doit  les respecter, ainsi que vient de le confirmer la Cour de Cassation dans un arrêt du mois de décembre 2015.
Je vous invite à partager la lecture d'un article paru dans le numéro 47 de la revue "Votre Avocat vous informe", publié par les Editions Dalloz et le CNB.

"Signature d’un bail commercial : preuve du mandat et indivision

La preuve de l’existence et de l’étendue du mandat de gestion immobilière délivré à un professionnel ne peut être rapportée que par écrit.

Par la décision rapportée, rendue à propos de la conclusion d’un bail commercial, la haute juridiction confirme tout d’abord que seul un écrit peut prouver l’existence et le contenu d’un mandat détenu par un professionnel de l’immobilier.

Il s’agit d’une règle d’ordre public qui découle du premier alinéa de l’article 6 de la loi «Hoguet » du 2 janvier 1970, laquelle règle ne saurait être tenue en échec par la ratification de l’acte par le mandataire (qui a accepté les loyers du locataire) ou par l’existence d’un mandat apparent.

La première chambre civile rappelle ensuite qu’eu égard à la propriété commerciale qu’elle confère au cocontractant du bailleur indivis, la signature d’un bail commercial relève des actes de disposition.

De ce fait, une telle signature requiert, d’une part, l’accord de l’ensemble des coïndivisaires (en application de l’art. 815-3 c. civ.) et, d’autre part, la conclusion d’un mandat spécial écrit avec le mandataire."

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 2 décembre 2015, 14-17.211

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mercredi 27 janvier 2016

Marchés de travaux - Sous-traitance et responsabilité quasi-délictuelle




Revue de Presse

En matière de marchés publics et de responsabilité du sous-traitant à l'égard du maître d'ouvrage, le Conseil d'Etat opère un revirement de jurisprudence.
En l'espèce, le marché public concerne des travaux dans une piscine communale.
Je vous invite à partager la lecture d'un article paru dans le numéro 47 de la revue "Votre Avocat vous informe", publié par les Editions Dalloz et le CNB.


"MARCHÉS DE TRAVAUX

 Sous-traitance et responsabilité quasi-délictuelle 

En matière d’exécution de travaux publics, le maître de l’ouvrage peut désormais agir contre le sous-traitant sur le terrain quasi-délictuel.

Le Conseil d’État vient d’opérer un revirement de jurisprudence s’agissant de la responsabilité du sous-traitant à l’égard du maître d’ouvrage : il permet désormais que ce dernier puisse rechercher, sur le terrain quasi-délictuel, la responsabilité des sous-traitants avec lesquels il n’a pas conclu de contrat de louage.

Bien qu’il eût admis cette possibilité par le passé, il avait par la suite précisé que seules les personnes ayant passé avec le maître de l’ouvrage un contrat de louage d’ouvrage peuvent être condamnées envers ce dernier à réparer les conséquences dommageables d’un vice de cet ouvrage imputable à sa conception ou à son exécution.

L’entrepreneur principal était donc le seul responsable de la bonne exécution des travaux.

Dans l’arrêt d’espèce, après avoir constaté des désordres issus de travaux de réfection d’une piscine, la commune de Bihorel a recherché la responsabilité d’un sous-traitant intervenu sur ces travaux.

Or, le Conseil d’État affirme sur ce point « qu’il appartient, en principe, au maître d’ouvrage qui entend obtenir la réparation des conséquences dommageables d’un vice imputable à la conception ou à l’exécution d’un ouvrage de diriger son action contre le ou les constructeurs avec lesquels il a conclu un contrat de louage d’ouvrage ; qu’il lui est toutefois loisible, dans le cas où la responsabilité du ou des cocontractants ne pourrait pas être utilement recherchée, de mettre en cause, sur le terrain quasi-délictuel, la responsabilité des participants à une opération de construction avec lesquels il n’a pas conclu de contrat de louage d’ouvrage, mais qui sont intervenus sur le fondement d’un contrat conclu avec l’un des constructeurs ».

Toutefois, précise le Conseil d’État, le maître d’ouvrage ne saurait « se prévaloir de fautes résultant de la seule inexécution, par les personnes intéressées, de leurs propres obligations contractuelles ».

En outre, « alors même qu’il entend se placer sur le terrain quasi-délictuel, le maître d’ouvrage ne saurait rechercher la responsabilité de participants à l’opération de construction pour des désordres apparus après la réception de l’ouvrage et qui ne sont pas de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination ».

Ainsi, la commune de Bihorel, qui avait réceptionné les travaux et s’est bornée à invoquer la méconnaissance du contrat conclu entre l’entrepreneur et le sous-traitant, n’était pas fondée à rechercher la condamnation, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle, de ce dernier.

Le Conseil d’État précise également que, lorsque le juge administratif statue sur la responsabilité des constructeurs en matière de garantie décennale, il lui incombe d’apprécier « si les conditions d’engagement de cette responsabilité sont ou non réunies et d’en tirer les conséquences, le cas échéant d’office, pour l’ensemble des constructeurs ».

Conseil d'État, 7ème / 2ème SSR, 07/12/2015, 380419


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